La honte accompagne toutes les formes de TCA, à un moment ou un autre de leur histoire. Elle empoisonne la vie quotidienne, par l’obligation permanente de se cacher, qui isole rapidement des autres, d’autant qu’elle s’accompagne inévitablement de mensonge.
Elle entame progressivement une estime de soi déjà généralement faible, en accréditant la croyance que la relation pathologique à l’alimentation « prouve » une anormalité générale.
Et surtout, elle enferme dans la maladie, qui ne peut être soignée tant qu’elle n’est pas acceptée comme telle (courbe du deuil).
La fierté constitue un enfermement supplémentaire pour les anorexiques, du moins tant que cette fierté est plus forte que la honte. Bien sûr, une anorexique dira qu’elle veut guérir, comme un alcoolique dira qu’il veut se sevrer. Mais dans le fond, son attachement au bénéfice secondaire du symptôme (fierté de la capacité de contrôle chez l’anorexique ; apaisement de l’angoisse chez l’alcoolique) est trop fort pour supplanter ce vœu rationnel.
Chez les boulimiques aussi, la fierté existe si le poids est contrôlé, même si les crises de boulimie entament sérieusement l’image de contrôle que le malade voudrait avoir de soi.
Mais lorsque le poids dérive, c’est la honte qui prédomine, parfois accompagnée d’une attitude plus « bravache » que fière, opposée à celle de l’anorexique qui affiche souvent une humilité un peu honteuse derrière laquelle se cache en fait un solide attachement à sa « supériorité ».