Patient, entamer une thérapie - troubles des comportements alimentaires
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Entamer une thérapie

Entamer une thérapie, ou s’attaquer à l’Himalaya…

Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi comme ça ? Une de vos premières démarches consiste à essayer de comprendre pourquoi vous n’allez pas bien, et c’est tant mieux, parce que l’être humain a cette faculté formidable de pouvoir s’appuyer sur son intelligence pour se soigner.

Mais cette intelligence est un cadeau empoisonné. Car s’il est indispensable de pouvoir, d’abord, mettre en mots les troubles qui peuvent n’être perçus que comme des bizarreries, quand ils ne sont pas tout simplement occultés, cette première étape ne suffit pas. Elle n’est que le prélude à une possibilité de traitement.

Souvent, la deuxième étape consiste à chercher, parfois avec acharnement, l’origine, pour ne pas dire la cause de la maladie. Et voilà le malade, ses proches, certains médecins, passer au crible le passé, l’enfance, donner une importance nouvelle à des détails qui avaient échappé, à des événements passés inaperçus. Toute cette investigation, généralement source (et résultat) d’une intense culpabilité de la part des proches, satisfait le besoin de rationalité, et présente le grand avantage (et le grand risque), pour le malade, de ne pas s’attaquer à sa pathologie. Car quand bien même on trouverait enfin « l’ » explication, le risque serait d’en conclure que tout est gagné : puisqu’on sait d’où ça vient, il n’y aurait plus qu’à traiter. Or non seulement il ne suffit pas de « savoir », mais encore le risque ultime, peut-être le pire, serait de se retrouver enfermé dans une explication qui barre la voie à toute autre investigation. A chaque fois qu’on tenterait de s’en éloigner, pour parler du vécu présent, on y serait ramené, dans un remâchage morbide des « facteurs déclenchants ». Et puisqu’on ne peut pas refaire l’histoire, la maladie serait finalement une fatalité.

Derrière cet engrenage se profile en fait la peur du changement, principal objet de travail du thérapeute. Car paradoxalement, et quand bien même le malade aurait dépassé les étapes successives de nier le problème, puis d’être persuadé de pouvoir s’en sortir seul, pour enfin accepter d’être aidé par un thérapeute, cette peur constitue le frein le plus redoutable car le plus inconscient à la guérison.

C’est pourquoi, plus qu’expliquer, analyser, interpréter, je m’efforce sans cesse de convaincre et rassurer le patient qui se lance dans cette entreprise si périlleuse de lâcher la proie pour l’ombre, qu’il peut se construire une vie « un peu » différente. Un peu, c’est-à-dire avec les mêmes ressources, mais utilisées différemment. Comme si, avec le même jeu de cartes, un carré d’as passé inaperçu était brusquement mis à jour.

Ceci n’a rien d’évident, car quand bien même la situation actuelle est insupportable, le patient y est habitué, et cette habitude est plus forte que tout. Il faudra constamment pointer avec lui les changements positifs, même mineurs, et leurs conséquences sur l’ensemble de la vie ; peser le poids des bénéfices de ces changements par rapport aux bénéfices secondaires de ses symptômes ; aider à mettre à jour les bonnes cartes pour que progressivement le patient puisse voir les évidences positives ; soutenir dans le découragement ; rester vigilant dans l’euphorie du mieux-être… Les changements ses font par pallier, tout à fait imprévisible, et il faut pouvoir tenir la distance lorsqu’ils tardent à venir. C’est aussi le rôle du thérapeute.

Pour amadouer cette peur du changement, on peut dire que tous les moyens sont bons : groupes de parole, en présence de personnes plus malades (qui peuvent fasciner mais aussi servir de contre-modèles) et d’autres moins malades (qui prouvent qu’on peut s’en sortir) ; thérapie en tête à tête, permettant de créer une empathie source d’affirmation de soi ; techniques de prise de conscience de ses émotions… Les liens proposés dans ce site renvoient à d’autres sites qui fournissent toutes les explications nécessaires sur les différentes thérapies.

Ce qui est certain, c’est que la thérapie ne peut « marcher », et durablement, que si vous adhérez à ce qu’elle vous propose. Sachant qu’au cours de votre évolution, vous pourrez aussi trouver plus d’intérêt à un type de thérapie, puis plus tard à un autre. L’essentiel est que vous viviez le changement dans votre vie quotidienne, que vous en sentiez les bénéfices : c’est encore le moyen le plus sûr que vous continuiez à progresser.

Vous l’aurez compris : l’objectif n’est tant pas de résoudre l’équation qui vous a amené au TCA que de transformer vos maux en mots, afin que votre corps cesse d’être le réceptacle d’émotions qui ne trouvent pas d’autre voie pour s’exprimer, et que votre esprit soit dégagé d’obsessions qui vous empêchent de vivre.

Aujourd’hui, ça vous parait insurmontable : c’est normal, une montagne est devant vous, il faut la franchir. Mais plus vous avancerez, plus vous verrez que vous étiez capable de la gravir. Car l’énergie que vous mettez aujourd’hui à vous focaliser sur l’alimentation prouve que vous avez les ressources pour franchir l’Himalaya ! Il faut « juste » qu’elle puisse être progressivement utilisée à votre profit, et non l’inverse.