Parce qu’elle touche un besoin d’ordre très primaire, la nourriture exprime la part la plus primitive de l’affectivité. Le premier contact de l’être humain avec le monde passe par la nourriture, du moment même de sa gestation. Se nourrir est sa première compétence. En même temps, elle organise à la fois sa relation à lui-même et aux autres.
C’est pourquoi, schématiquement, lorsque le processus de maturation affective se bloque, on peut assister à une sorte de régression dans la manière de gérer cette relation. Les sentiments, les émotions, ne passent plus (pas) par les mots mais par le corps, à la façon du bébé qui, dénué de langage, crie pour faire savoir ses besoins. A l’origine de ce recours aux comportements, il y a toujours de l’angoisse. Elle s’exprime de cette manière parce que c’est le moyen que la personne a instinctivement (ou inconsciemment) considéré comme le plus approprié pour canaliser son angoisse.
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Parmi les maladies psychiques, les TCA occupent une place à part. Notamment parce qu’interviennent des aspects philosophiques, ethnologiques et sociologiques qui ne contribuent pas à la clarté. Car après tout, chacun a sa manière de manger, individuellement mais aussi collectivement, selon les rites religieux, les coutumes nationales ou tribales, l’abondance ou la rareté de la nourriture, etc.
D’où l’importance d’un cadre de référence à la fois précis et adapté à la culture (familiale, religieuse, etc) du patient. Car il faut pouvoir lui donner des repères (qui lui manquent souvent, ou qu’il a perdus) tout en tenant compte de son individualité. Lui ré-apprendre à se nourrir, mais plus comme s’il était encore un enfant puisqu’on ne repart pas de zéro.
Par leurs aspects multiples (comportementaux, psychologiques, sociaux…), et leurs racines tout aussi nombreuses, les TCA nécessitent le plus souvent une prise en charge par plusieurs intervenants : psychothérapeute, diététicien, généraliste (en ville), art-thérapeute, ergothérapeute, kinésithérapeute, etc (à l’hôpital).
Côté psychothérapie, tout l’enjeu sera de repartir de la fragilité interne, pour progressivement rendre l’addiction « inutile » (voir schéma ci-contre). Mais tout moment n’est pas propice à l’enclenchement, à la poursuite et au succès d’une psychothérapie.